Antonin Artaud, né le 4 septembre 1896 à Marseille et mort le 4 mars 1948 à Ivry-sur-Seine, est un théoricien du théâtre, acteur, écrivain, essayiste, dessinateur et poète français. La poésie, la mise en scène, la drogue, les pèlerinages, le dessin et la radio, chacune de ces activités a été un outil entre ses mains, un moyen pour développer son art. Toute sa vie, il a lutté contre des douleurs physiques, diagnostiquées comme issues de syphilis héréditaire, avec des médicaments, des drogues. Cette omniprésence de la douleur influe sur ses relations comme sur sa création. Il subit aussi des séries d’électrochocs lors d’internements successifs, et il passe les dernières années de sa vie dans des hôpitaux psychiatriques, notamment celui de Rodez. Si ses déséquilibres mentaux ont rendu ses relations humaines difficiles, ils ont aussi contribué à alimenter sa création. Il y a d’un côté ses textes « fous de Rodez et de la fin de sa vie », de l’autre, selon Évelyne Grossmann, les textes fulgurants de ses débuts. Déçu par le théâtre qui ne lui propose que de petits rôles, Antonin Artaud espère du cinéma une carrière d’une autre envergure. « Au cinéma l'acteur n'est qu'un signe vivant. Il est à lui seul toute la scène, la pensée de l'auteur. » Il s’adresse alors à son cousin Louis Nalpas (1884-1948), directeur artistique de la Société des Cinéromans, qui lui obtient un rôle dans Surcouf, le roi des corsaires (1924) de Luitz-Morat et dans Fait divers, un court-métrage de Claude Autant-Lara, tourné en mars 1924, dans lequel il interprète « Monsieur », l’amant étranglé au ralenti par le mari. Toujours par l’intermédiaire de son cousin, Artaud rencontre Abel Gance et sympathise avec lui, au grand étonnement de l’entourage du cinéaste, réputé d’accès difficile. Pour son film Napoléon (1927) en préparation, Abel Gance lui promet le rôle de Marat. À la fin de l’année 1927, apprenant la préparation du film La Chute de la maison Usher de Jean Epstein, Artaud propose à Abel Gance de jouer le rôle de Roderick Usher. De la dizaine de scénarios écrits et proposés, un seul sera tourné : La Coquille et le Clergyman par Germaine Dulac. Engagé en même temps par Carl Theodor Dreyer pour son film La Passion de Jeanne d’Arc, Artaud délaisse le rôle du clergyman qui lui était dévolu et ne suit que par intermittence la réalisation de La Coquille. Le soir de la première projection au Studio des Ursulines, le 9 février 1928, les surréalistes venus en groupe à la séance manifestent bruyamment leur désapprobation. Dès lors, la magie du cinéma n’existe plus pour lui. Il poursuit malgré tout une carrière d’acteur, pour subvenir à ses besoins. L’avènement du parlant le détourne de cette « machine à l'œil buté » à laquelle il oppose « un théâtre de sang qui à chaque représentation aura fait gagner corporellement quelque chose». En 1935, il apparaît deux ultimes fois dans Lucrèce Borgia d’Abel Gance et dans Kœnigsmark de Maurice Tourneur. Antonin Artaud a tourné dans plus de vingt films, sans jamais avoir obtenu le moindre premier rôle ni même un second rôle d’importance.